Bientôt, les panneaux en français passent en anglais. Le trajet se déroule dans un jeu d’ombre et de lumière entre les villes et l’autoroute. Pause de 15min pour manger sur une aire : il y a la queue partout, pas de chance, ce ne sera pas assez de temps pour réussir à obtenir son repas ! Nous ignorions alors que ce premier échec était annonciateur d’une longue série durant ce séjour.
Nous chargeons nos sacs sur nos dos pour atteindre l’auberge de jeunesse que nous avons choisie – prix très abordables, proximité avec la gare ! C’est assez curieux de passer de deux semaines dans des endroits reculés et silencieux à un dortoir bruyant : portes de casiers qui claquent, rires dans les couloirs, jet de la douche, chasses d’eau. Ça me rappelle l’ambiance de l’internat, quand j’étais au lycée, cette promiscuité avec des personnes qu’on ne connaît pas, cette atmosphère bonne enfant. C’est familier. Nous nous faufilons dans le noir pour ne pas réveiller nos coturnes, tâtonnons pour trouver les couvertures et draps sur les lits superposés. La nuit nous appelle.
Le lendemain matin, à la lumière du jour, nous défaisons nos sacs… et réalisons qu’il manque l’une de nos pochettes importantes de matériel photo. Vent de panique ! Vous savez, quand vous cherchez quelque chose qui manque, et que vous avez le doute permanent : est-ce que je l’ai bien mis à l’endroit habituel ? Qu’est-ce qui aurait pu se produire ? Pourquoi ce n’est pas là ? Nous retournons toutes nos affaires, en vain. La pochette a disparu. Dans ces cas-là, une solution : remonter soigneusement le fil des événements. La pochette était dans son sac dédié, qui était lui-même à nos pieds. À un moment, une personne s’est installée à notre place quand nous avons pris une pause. Elle s’est excusée en disant ne pas trouver de place et est partie. J’ai eu ce léger doute : vérifier les sacs ? Et je me suis dit mais non, ça ne risque rien. Cela aurait pu tout aussi bien tomber : un mauvais virage, nous tout ensommeillés, la pochette qui glisse sous les sièges…
Bref. Cette pochette est très importante pour Antoine : elle contient les câbles pour son appareil photo. Il n’imaginait pas que de se retrouver avec une faille dans son matériel de narration le contrarierait autant. Et pourtant, c’est le cas. On se dit, ce n’est pas grave, on essaye de ne pas y penser, de se distraite, mais ça reste. Parce que cet appareil photo est aussi un fil conducteur, l’attrape-lumière toujours autour de son cou. Raconter fait partie intégrante de ce parcours.
4 commentaires
Nous sommes désolés d’apprendre que votre voyage vient d’être perturbé par cette série d’imprévus fâcheux. le prochain chapitre sera, espérons-le’, plus rassurant. Votre séjour à Boston nous rappelle de vieux souvenirs. Nous y avions passé cinq jours en avril 1990, nous avions réservé une chambre d’hôte dans une proche banlieue, tenue par une dame charmante, les trains étaient très fréquents pour aller en ville et revenir. Je ne pense pas avoir vu tous les monuments que vous nous signalez, mais j’ai le souvenir, en revanche, d’un immeuble de style vénitien (en fait acheté sur place et reconstruit à Boston!) devenu un musée de peintures et d’arts divers collectionnés par la défunte propriétaire.
L’analyse que vous faites des sentiments et des soucis qu’ éprouvent les créateurs est aussi d’un grand intérêt. Je vous soumets à cette occasion une citation tirée de l’oeuvre de l’écrivain et poète carcassonais Joê Bousquet , condamné à l’immobilité après une blessure de guerre en 1917, pensée dont j’ai eu moi-même l’occasion de constater qu’elle s’appliquait aussi bien à la recherche scientifique: « On ne crée un peu qu’à force de détruire son oeuvre ». Qu’en pensez-vous?
Nous attendons de meilleures nouvelles et vous embrassons de tout coeur,
Grand-père et Suzanne
Cher Jean-Claude,
Merci pour ce message ! Oui, parfois nous découvrons une ville selon des circonstances… mais depuis, tout va mieux ! Contents de savoir que nos articles ravivent de beaux souvenirs. Merci pour cette belle citation. À très bientôt,
Antoine et Samantha
Je suis désolée d’apprendre que cette étape urbaine se soit si mal déroulée. Comme je le disais précédemment je n’ai que peu d’affection pour les destinations urbaines des USA, et cela ne va pas me réconcilier avec les grandes villes. Je suis davantage éprise de grands espaces.
Ménage-toi quand même pour la suite, ainsi qu’Antoine.
Cette étape vous aura appris d’autres choses, bien que moins agréablement. Je vous souhaite une meilleure suite de voyage, et que des belles découvertes viennent effacer ces mésaventures.
Merci beaucoup Emilie 🙂