Déjà, notre horloge interne s’affole. C’est un bond dans le temps qui fracture des semaines d’un rythme parfaitement réglé. Dans le désert, loin des lumières et des écrans, nos journées commençaient à 6h du matin pour s’achever à 20h. C’est perdus et ensommeillés que nous franchissons la douane japonaise, en articulant tant bien que mal quelques formules de politesse. Notre séjour à Tokyo sera très bref : deux nuits et une journée complète sur place. Antoine a déjà eu l’occasion de découvrir la ville quand il était étudiant, et moi il y a quelques années pour le travail, dans le cadre d’un partenariat entre les Beaux Arts et le Comité Colbert. Nous avons envie que cette dernière constellation soit celle des étapes loin des sentiers battus. Kim, mon ancienne éditrice chez Pika Edition, n’est hélas pas présente au même moment que nous : dommage ! Mais ses enseignements sont restés précieusement gravés, et les automatismes se retrouvent vite dans le métro de la mégapole, pour prendre nos tickets. Nous louons une petite chambre à un particulier, dans le quartier d’Asakusa. Soulagement de poser nos bagages et de nous allonger sur les futons. Après quelques heures seulement de sommeil, nos yeux s’ouvrent d’eux-mêmes à 4h du matin heure locale. Impossible de se rendormir. Nous âmes sont encore quelque part à Los Angeles. Déjà, nous commençons à parler de ce que nous avons envie de faire. Il y a tant à découvrir ! Ni une, ni deux, dès l’aube, nous voici parés pour arpenter les ruelles brumeuses et silencieuses. Les souvenirs se superposent à ceux de nos précédentes visites. Je suis de nouveau charmée par la quiétude qui règne dans cette ville, pourtant réputée pour être survoltée. Il y a dans la culture japonaise un sens de l’organisation, de la discipline, du respect de l’autre, qui est très reposant pour les voyageurs que nous sommes. Inconsciemment, nous calquons nos décisions sur la rigueur ambiante. S’interdire de traverser un passage piéton quand le petit bonhomme est rouge. Veiller à ne pas frôler ses voisins dans le métro. Remercier encore et encore en inclinant le dos. Atmosphère aux antipodes des Etats-Unis.